Produits structurés : une classe d’actifs dynamique  

Les produits structurés ont connu une réelle démocratisation au cours des dernières années, entrant progressivement dans les portefeuilles des particuliers en recherche de rendement et de diversification. Le mouvement s’est accéléré à la faveur de la remontée de taux d’intérêt à partir de 2022. Très marginale il y a quelques années, l’offre est très dynamique, présente désormais chez tous les acteurs, avec une moyenne de 200 à 300 référencements de produits par an dans les gammes, et des pointes jusqu’à 1000 pour acteurs les plus offensifs.

Produits structurés : une complexité qui entrave la transparence 

Réservés à des investisseurs avertis, les produits structurés sont des produits complexes, avec des sous-jacents qui peuvent comporter jusqu’à 20 actions ou fondés sur des indices peu courant (niveau d’emploi ou pouvoir d’achat par exemple). Les évolutions des modèles mathématiques et l’introduction de l’intelligence artificielle ont encore accentué cette caractéristique, en incluant des variantes dites « exotiques » ou « dérivées ».

De plus, bien que le concept de « Best Execution » s’applique aux produits structurés, il peut être difficile de garantir à l’investisseur d’obtenir systématiquement le meilleur prix disponible au moment de la transaction. Cela complique davantage leur valorisation.

A cette complexité intrinsèque des produits s’ajoutent des mécanismes tarifaires souvent opaques et peu compréhensibles pour le client final.

Une prise en compte croissance de la protection des investisseurs 

Avec le « Retail Investment Strategy Package », l’Union européenne s’est engagée dans une démarche approfondie de protection des investisseurs. C’est dans cette optique que se place « Value for money », qui impose depuis fin 2022 l’analyse des frais appliqués aux OPCVM commercialisés en assurance-vie pour favoriser leur baisse tendancielle. Une extension aux produits structurés alignerait d’ailleurs les pratiques avec les directives MiFID 1 et 2, qui cherchent à accroître la transparence et à renforcer la protection des consommateurs, notamment dans la distribution des produits financiers complexes.

Téléchargez notre guide « Unités de compte : face à Value for money et Industrie verte, domptez la vague » 

Or l’obtention d’informations claires sur les frais associés aux produits structurés – frais de gestion, frais de structuration ou commissions de souscription – reste aujourd’hui un défi. Et ce malgré des avancées obtenues avec PRIIPS et MIFID. Par exemple, les KID annoncent les limites de l’incidence des coûts à respecter pour un référencement chez l’assureur. Toutefois, seuls les frais maximums sont affichés, avec une transparence limitée sur le récipiendaire de ces frais.

La transposition de « Value for money » conduirait à une nette amélioration de la transparence des frais. Et toute surcharge de frais pourrait entraîner l’exclusion du produit des référencements chez les assureurs. De quoi inciter les parties prenantes à une vigilance accrue sur les frais prélevés. Et permettre aux clients de mieux comprendre les coûts liés à ces produits et faciliter leurs décisions d’investissement.

Améliorer le devoir de conseil sur les produits structurés

La probable extension de « Value For Money » aux produits structurés en assurance-vie pose la question de la sensibilisation et l’accompagnement des clients et des distributeurs. Il devient essentiel pour les assureurs de mettre en place des programmes de formation pour les distributeurs afin de les familiariser avec les principes de « value for money » sur les produits structurés. Et ce dans le but de faciliter le devoir de conseil en fournissant des informations détaillées sur les frais associés à ces produits et de les expliquer aux clients de manière claire et transparente.

En rendant compte ouvertement des frais appliqués, les acteurs de l’industrie seront incités à adopter des pratiques plus responsables et à proposer des produits mieux adaptés aux besoins des clients.

Produits structurés : quelle grille d’analyse du couple frais/rendement ? 

La transparence qu’imposerait la transposition de « value for money » aux produits structurés pose en outre d’importantes difficultés pratiques. En particulier s’agissant de la grille de référence permettant d’apprécier le niveau des frais au regard de la performance.

Dans le cas des OPCVM, « Value for money » a conduit à l’établissement de frais moyens par catégorie de produits puis au déréférencement des produits dépassant ces seuils. En raison de la diversité et de la complexité des produits structurés, cette démarche est difficilement transposable. Il est en effet difficile de déterminer des frais moyens universels.

Une approche plus granulaire tenant compte des spécificités de chaque investissement, comme le niveau de garantie du capital, le type de sous-jacent ou encore le niveau de barrière, pourrait être nécessaire. Une autre approche consisterait à identifier la marge conservée par l’émetteur dans la structuration du produit et les frais d’upfront & running à destination du distributeur, pour pouvoir les encadrer. Ce mécanisme encourage en effet la multiplication des référencements par les assureurs. La clarification de ces différents frais constituerait ainsi un préalable à l’exercice « Value for money » sur ces produits.

Produits structurés et value for money : des travaux préparatoires disparates 

Conscients des enjeux, les assureurs ont déjà engagé des travaux préparatoires à une possible application de « value for money » aux produits structurés.

Des acteurs de la place ont ainsi lancé des travaux internes pour évaluer la performance des produits par rapport aux frais, notamment en comparaison avec un benchmark. Ce travail d’évaluation s’attache à prendre également en compte une caractéristique propre aux produits structurés : la protection du capital.

Au couple frais/rendement pris en compte pour les OPCVM s’ajouterait ainsi un troisième critère crucial. Comment l’intégrer dans les analyses ? Les travaux engagés sont à l’heure actuelle trop préliminaires pour le dire. La place devra ainsi affiner et harmoniser les pratiques.

Autre difficulté : le suivi et la gestion des produits structurés se heurtent à un manque de solutions existantes. Des bases de données recensant les offres existantes et des simulateurs de rendement existent. Cependant, la majorité des outils demeurent internes à chaque acteur, ce qui rend difficile l’exercice de comparaison.

Dans un souci de transparence et de clarté pour les investisseurs, un outil global de gestion des produits structurés pourrait voir le jour et offrir une vision exhaustive et détaillée des frais et des performances de ces produits.